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Auteur(es) : | MAGNAGHI Alberto |
Editeur : | Eterotopia France |
Parution : | avril 2014 |
L'ONU prévoit pour 2050 que, sur les 9 milliards d'habitants, 6,4 seront des urbains. Les villes seraient alors des méga-régions de dizaines de millions d'habitants au lien social brisé et à l'espace public dissolu. Pour lutter contre ce phénomène, l'auteur présente sa piste d'amélioration : la biorégion.
Biorégion urbaine: c’est l’ensemble des relations sociales, économiques et culturelles qui caractérisent les espaces à l’âge de la révolution urbaine.
Villes, collines en terrasses, campagnes travaillées, forêts animées, ont chacune des métabolismes qui se sont transformés à travers les civilisations successives, mais qui toujours entretiennent des structures vivantes. Le territoire, compris comme un système vivant naît et grandit. Il peut tomber malade, il peut mourir quand la relation de synergie est interrompue – nous parlerons alors de « crise des civilisations » – mais il peut aussi renaître.
L’urbanisation du monde est elle irréversible? Pourquoi faudrait-il l’arrêter, l’ « air de la ville » rend libre, n’est-ce pas?
Effectivement, il fut un temps où il permettait de s’affranchir du fief, puis quand aller chercher un salaire à l’usine libérait de la fatigue des champs. Mais aujourd’hui, la ville, cette terre promise, n’est plus qu’un mirage. Le plus grand exode de l’histoire de l’humanité est à l’Oeuvre : d’une part vers l’hyper-espace télématique, assujetti à la domination des réseaux globaux et, d’autre part vers lesmega-cities ou méga-régions de dizaines de millions d’habitants du Sud et de l’Est du monde.
En 2050, sur 9 milliards d’habitants 6,4 seront des urbains selon l’ONU. Mais les protagonistes de ce méga-exode n’arrivent plus « en ville », ils arrivent dans desurbanisations post-urbaines démesurées et sans fin. Ces produits exponentiels des processus de déterritorialisation ont déjà gagné les banlieues de la ville-usine occidentale et ils se traduisent par la rupture des relations culturelles et environnementales avec les lieux et avec la terre, la perte des liens sociaux, la dissolution de l’espace public, des conditions d’habitat dé-contextualisées et homogènes, et la croissance de nouvelles pauvretés.
Dans la civilisation des machines, ce « royaume » du post-urbain, et du post-rural s’est construit par la rupture des relations de co-évolution entre les établissements humains, la nature et le travail, qui caractérisaient, avec leurs bienfaits et leurs méfaits, les civilisations précédentes. La voie de la déterritorialisation sans retoura été ouverte par l’enclosure des commons, la privatisation et la marchandisation progressives des biens communs naturels (la terre, d’abord, puis l’eau, l’air, les sources d’énergie naturelle, les forêts, les rivières, les lacs, les mers, etc) et desbiens communs territoriaux (les villes et les infrastructures historiques, les systèmes agro-forestiers, les paysages, les ouvrages hydrauliques, l’assainissement, les ports, les installations de production énergétique). Cette déterritorialisation a transformé les habitants en consommateurs individuels, en clients du marché, et les lieux en sites voués à des fonctions qui servent la logique des réseaux globaux. L’urbanisation de la planète qui engendre ce processus est catastrophique. Elle conduit à la fin de la ville par la mutation anthropologique qu’elle produit. Plus encore, elle est éco-catastrophique par ses effets sur le climat, sur la consommation de sol fertile, sur les écosystèmes, liés à son ampleur, sa vitesse et ses formes.
Si cette urbanisation n’est pas la terre promise, inous pouvons l faut alors aller à la recherche des formes due contre-exode. Les lieux périphériques et marginaux font preuve d’une résistance accrue à leur extinction crépuscule et à leur enfrichement. Des nouveaux agriculteurs favorisent leur repeuplement, alliés à des citoyens soucieux de construire une nouvelle civilisation urbaine et rurale. Le contre-exode est à la fois matériel et culturel. Il est un « retour au territoire en tant que bien commun », pour ré-animer des lieux, retrouver la mesure des vil- les et des établissements humains. Cela demande de faire grandir la « conscience des lieux », pour reconstruire des relations de synergies entre les établissements humains et l’environnement; pour promouvoir de nouvelles façons conviviales et sobres d’habiter et de produire; pour valoriser une citoyenneté active, des réseaux civiques et des formes d’auto-gestion des biens communs capables de fabriquer une richesse durable en chaque lieu du monde.
L’outil conceptuel et opérationnel que nous proposons pour initier ce “retour au territoire” est la biorégion urbaine. C’est un moyen de redessiner, à contre courant, les relations entre les établissements humains et l’environnement , en choisissant et en mettant en œuvre, comme dans la construction d’une maison, les « éléments constructifs » du projet de territoire. Ces matériaux de construction sont, à l’échelle du territoire:
Le projet de biorégion fait référence à des expériences en cours dans des régions d’Europe où l’urbanisation a déjà atteint un seuil critique. Elles nous indiquent des voies à suivre pour contenir le grand exode vers la méga-city, en opposant la vision d’une planète fourmillant de biorégions en réseau, et pour une « mondialisation par le bas » fondée en chaque lieu sur la gestion collective du territoire, ce bien commun.
Alberto Magnaghi, architecte et urbaniste, est Professeur émérite à l’Université de Florence où il dirige le “Laboratorio di Progettazione Ecologica degli Insediamenti (LAPEI). Il est Président de l’association multidisciplinare “Società dei Territorialisti” et fondateur de la “scuola territoriali sta italiana”.
Fiche technique
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